Anthony de Mello est un prêtre jésuite, guide spirituel et psychothérapeute mais il est surtout connu pour ses ouvrages sur la spiritualité. J’ai découvert ses écrits à travers le livre “Awareness” qui, à priori, n’est disponible qu’en anglais mais si vous le souhaitez, d’autres livres de cet auteur comme “Quand la conscience s’éveille”, “Redécouvrir la vie” ou “Contes de sagesse” sont disponibles en français.
Pour commencer ce résumé par une citation, dans l’un de ses romans, Mark Twain écrivait : “Il faisait si froid que si nous avions eu un thermomètre avec plus de graduations, nous aurions été mort de froid”. Il est évident que l’on ne gèle pas à cause des mots mais cette phrase nous rappelle que dans notre esprit, le froid et ce qu’indique le thermomètre sont deux choses différentes mais qu’elles peuvent compter tout autant dans notre perception des choses.
Ces mots de Mark Twain sont une bonne introduction à la pensée d’Anthony de Mello qui souhaite nous faire comprendre que notre malheur vient du fait que ce qui compte pour nous, ce n’est pas tant la réalité mais ce que l’on se dit à nous-même de cette réalité.
Pour faire encore plus simple et se rapprocher du bouddhisme : les problèmes ne viennent pas des choses mais de l’image que l’on s’en faite.
Tout se passe dans votre tête.
Prenons un exemple très simple : Imaginons que vous rencontriez quelqu’un qui vous dise que vous êtes une personne admirable (même si elle n’en pense pas un mot) : tout à coup vous allez vous sentir bien grâce à elle.
Imaginons maintenant qu’une dizaine de minutes plus tard, un ami vous annonce que cette même personne vient de lui dire que vous étiez détestable. Il y a fort à parier que vous allez désormais vous sentir mal à cause d’elle.
Votre état d’esprit a changé mais, concrètement, qu’est ce qui a changé pendant ces dix minutes ? rien. Vous êtes toujours la même personne mais, et c’est là le problème, vous avez accepté que l’avis d’une autre personne modifie ce que vous ressentez.
Il faut se rendre à l’évidence : ce que nous ressentons, c’est nous même qui le faisons apparaître dans nos têtes. N’oubliez pas qu’à chaque fois que vous êtes triste, vous avez ajouté quelque chose à la réalité : La réalité a fourni un stimulus et vous avez fourni la réaction.
Et ce n’est pas la faute des autres.
Nous avons tous un peu perdu de vue les choses agréables de la vie : travail, jeu, amusement, rire, les plaisirs des sens et de l’esprit… car, avec l’âge, nous avons aussi découvert l’approbation et l’appréciation des autres, l’attention que les autres peuvent nous porter. On attend tellement des autres que cela devient une dépendance qui vous fait perdre votre liberté et votre temps car vous avez donné aux autres le pouvoir de vous rendre heureux ou malheureux : regardez moi, soutenez moi, appréciez moi, valorisez moi…
Que nous disons nous quand nous avons de la rancœur envers quelqu’un ? “C’est de sa faute, il ou elle doit changer”. Mais comme Gadhi disait le changement doit venir de vous et non l’autre – c’est à vous de changer et non l’autre.
Si l’un de vos invités se plaint du repas que vous avez préparé et que vous vous énervez, c’est parce que vous vous êtes identifié à ce repas et dans votre logique : quiconque s’en prend à ma cuisine s’en prend à moi.
Alors bien sûr, nous sommes dépendants des autres, mais si vous demandez aux autres de contribuer à votre bonheur, vous trouverez la peur : la peur de la perte, la peur de l’aliénation, la peur du rejet…
Votre bonheur ne dépend que de vous, il ne doit pas résider dans l’autre et quand vous aurez compris cela, vous cesserez de voir les autres comme un moyen de satisfaire vos addictions.
Pour autant, cela ne veut pas dire que si quelque chose n’est pas juste, vous ne devez “rien faire”. Vous devez seulement ne pas avoir de rancœur et vous contentez d’agir en laissant les sentiments de côté. Ce qui compte, ce n’est pas la réaction mais l’action. L’indignation ne sert à rien, c’est ce que vous faites qui compte.
Les étiquettes sont un poison.
De la même façon qu’il faut se détacher de ce que les gens pensent, il faut aussi se détacher des étiquettes. Comme les maîtres du Zen ont l’habitude de dire : “Ne cherchez pas la vérité, contentez-vous de laisser tomber vos opinions”.
Ne vous attachez pas à des étiquettes comme “J’ai du succès”. Ce genre de choses vont et viennent. Quand vous dites “J’ai du succès”, vous vous êtes identifié au succès, c’est une erreur. C’est la même chose quand vous vous dites je suis une femme d’affaire, une avocate.
Savez vous ce qui va vous arriver si vous vous identifiez à ces choses ? Vous allez vous y accrocher, vous allez vous inquiéter de leur disparition et ce sera la source de vos souffrances. Si vous souffrez, c’est que vous avez perdu le contact avec la réalité.
Encore une fois, il ne faut pas que votre estime de soi dépende de comment vous vous réfléchissez dans le miroir de l’esprit des gens “L’enfer c’est les autres”, comme disait Satre.
Et les désirs ne sont qu’un autre de nos problèmes.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, il semblerait que nous ne voulons pas être heureux sans condition. Notre raisonnement est le suivant “Je veux bien être heureux si je possède ceci et/ou cela” ce qui revient à dire “Tu es ma joie, si je ne t’ai pas, je refuse d’être heureux”.
Bien entendu, il ne faut pas supprimer les désirs car sans eux, nous serions sans énergie et sans vie mais il faut les comprendre et les voir tels qu’ils sont réellement. Si vous les comprenez bien, ils deviendront des préférences et cesseront de vous causer des tourments.
Vous devez comprendre la vraie valeur de vos désirs, les étudier sous toutes les coutures et voir à travers. Au bout d’un certain temps, vous n’aurez pas à y renoncer, ils tomberont tout simplement de vos mains comme un enfant délaisse un jouet qu’il connaît trop bien.
Pour changer, il faut commencer par s’observer.
Là où l’exercice principal proposé par le Zen est la méditation, Anthony de Mello propose l’observation de soi. Il s’agit de vous observer, vous et ce qu’il y a autour de vous, d’aussi loin que possible. Il faut en arriver à voir les choses qui vous arrivent comme si elles arrivaient à quelqu’un d’autre.
Quand une autre personne que vous doit passer un examen, cela ne vous affecte pas. Vous pouvez même vous permettre d’être philosophe et lui dire “Ne t’inquiète pas, détends toi et tu l’auras”. Mais quand c’est à votre tour de passer un examen, vous n’arrivez plus à avoir ce détachement car vous vous êtes identifié avec le “moi” (ma famille, mon pays, mes possessions…).
Vous devez être comme le ciel qui voit passer les nuages. Vous devez être un observateur passif et détaché.
Est-ce que vous vous dites “Je suis heureux” ? non vous n’êtes pas heureux. Le bonheur est peut être en vous en cet instant précis mais attendez, cela va changer, cela ne durera pas, cela ne dure jamais.
Est-ce que vous vous dites : “je suis déprimé” ? C’est faux, vous n’êtes pas déprimé. Si vous voulez être précis, vous devriez dire “Je ressens une dépression en ce moment”. Vous n’êtes pas votre dépression. La raison pour laquelle vous souffrez de votre dépression est que vous vous êtes identifié à elle. Observez la, laissez la passer…
Puis il faut se débarrasser du “Je”.
Quand nous disons “Qui suis je ?”. Quelle est cette chose que j’appelle “Je” ? “Je” n’est qu’un conglomérat de vos expériences et de votre conditionnement.
Si vous êtes en train de vous condamner ou de vous approuver, laissez vous faire et observez vous en train de le faire. “Je me condamne”, “je m’approuve”. N’essayez surtout pas de juger ou de changer quoi que ce soit.
Il faut que vous décidiez que le “je” n’existe pas.
Suis-je mes pensées ? Non. Les pensées vont et viennent, je ne suis pas elles.
Suis je mon corps ? Des millions de cellules meurent et sont remplacées chaque minute. L’ensemble des cellules de votre corps sont remplacées en moins de sept ans.
Suis je mon nom ? bien sûr que non, je peux le changer.
Et il en va de même pour ma religion, mon travail…
On passe sa vie à réagir à des étiquettes (femme, diplômée, jeune…) mais ces étiquettes appartiennent au “moi” et le “moi” change tout le temps.
Si vous vous observez de loin et que vous observez le “moi”, vous cesserez de vous identifier avec lui. Quand le “je” ne s’identifie plus avec l’argent, le nom, ou la nationalité, le “Je” est en sécurité, il est au dessus de tout ça.
Toute votre souffrance est causée par votre identification avec quelque chose, une étiquette, que cette chose soit à l’intérieur ou à l’extérieur du “moi”. Il est très important, si vous voulez vous réveiller de vous “auto observer”. Faites attention à ce que vous dites, ce que vous faites, ce que vous pensez.
Au fur et à mesure, vous serez plus à l’aise avec tout le monde et avec toutes les choses. Vous savez pourquoi ? Parce que vous n’aurez plus peur d’être jugé ou apprécié. Vous n’aurez même plus l’envie d’impressionner les autres.
Mais alors, qu’est ce que la joie ?
Observez-vous. Au bout d’un certain temps, vous n’aurez plus à faire aucun effort, car quand les illusions vont s’effondre, vous commencerez à savoir des choses qui ne peuvent être décrites : cela s’appelle la joie.
La vraie joie n’a pas de cause. L’autre ne peut pas vous rendre heureux, car il n’est pas votre joie. Pour être heureux, vous n’avez rien à faire. Vous devez simplement abandonner vos illusions.
Quand vous êtes en colère, au lieu d’être en colère, observez-vous en colère.
Avec cette vision, rien ne vous touchera et rien ne vous fera plus mal. Vous vivrez comme un roi/une reine. Vous n’avez peur de personne car vous serez heureux de n’être personne.
Si vous avez toutes vos compétences pour réussir, Il faut en arriver au point que peu vous importe de gagner ou de perdre. Comme le disait Churchill à sa façon : “Agissez comme si il était impossible d’échouer”.
Bien sûr, vous pourrez toujours être déprimé. Mais vous vous observerez et vous observerez cette dépression sans vous identifier à elle. Vous ne ferez rien pour la faire disparaître, vous la verrez juste passer et s’en aller.
La seule raison pour laquelle vous n’êtes pas heureux là tout de suite, c’est parce que vous vous concentrez sur ce que vous n’avez pas.
Les quatre étapes vers la sagesse.
La première des étapes est d’être en contact avec les sentiments négatifs dont vous n’avez même pas forcément conscience.
Vous ne pouvez pas soigner un cancer si vous n’avez pas conscience que vous en avez un. Vous devez vous rendre compte de ce que vous ressentez : taciturne, dégoût de soi, culpabilité, stress… Vous devez entrer en contact avec chacun de ces sentiments pour en avoir pleinement conscience.
La deuxième étape est de comprendre que ces sentiments sont en vous et qu’ils n’existent pas dans la réalité. On passe notre temps à vouloir changer les circonstances externes, changer notre patron, nos ennemis et le monde entier. La bonne nouvelle est que vous n’avez pas à changer quoi que ce soit car ces sentiments existent seulement en vous.
Supposons que la pluie tombe pendant un pique nique, qui se sent en colère ? la pluie ou vous ? Qui cause cette négativité ? La pluie ou vous ? La réalité n’est pas un problème, le problème est sa perception dans l’esprit de l’être humain. Vous êtes le problème, vous avez crée le problème, vous vous êtes identifié avec le “moi”.
La troisième étape : ne jamais s’identifier avec un sentiment. Ne vous définissez pas en terme de sentiments. Ne dites pas “je suis déprimé”, au pire, vous pouvez dire “c’est déprimant”. Si vous voulez dire que la dépression est là, pas de soucis mais ne dites pas “je suis déprimé”. Lorsque vous vous définissez en terme de sentiment, c’est une illusion.
Si vous avez une dépression, laisser la être, laisser la passer, elle va passer. Tout passe. Cela n’a rienà voir avec le “je” mais avec le “moi”.
On souhaite être désirés, applaudis, être attirant… avoir des petits singes qui nous courent après mais en fait, vous n’avez pas besoin du sentiment d’appartenance à quelqu’un, à un groupe ou à quoi que ce soit. Vous n’avez besoin de rien ajouter pour être libre.
La quatrième étape : comment vous pouvez changer les choses ? Imaginez un patient qui va chez le docteur et lui explique de quoi il souffre. Le docteur lui dit : “Très bien, j’ai compris vos symptômes. Vous savez ce que je vais faire, je vais prescrire un médicament pour votre voisin”. Le patient répond “Merci docteur, je me sens déjà mieux”. C’est absurde mais c’est pourtant ce que nous faisons tous, nous voulons que les autres changent mais c’est à vous de changer.
Pour résumer :
Première étape : Identifiez les sentiments négatifs. Un sentiment arrive : au lieu de m’inquiéter, je l’observe et je comprends que je suis déprimé, déçu, ou autre chose…
Deuxième étape : J’admets que ce sentiment est en moi et pas chez cette autre personne (qui ne m’a pas écrit, qui m’a mal traité, qui m’a vexé…).
Troisième étape : Je ne m’identifie pas aux sentiments. “Je” ne suis pas ce sentiment, “Je” ne suis pas déprimé, “je” ne suis pas seul, “je” ne suis pas déçu.
Quatrième étape : Je me rappelle que c’est moi qui doit changer.
Comme dans le Zen, l’objectif reste de se concentrer sur l’instant présent au lieu d’espérer un futur meilleur.
Chantal HELENE
HypnoCoach
Tel: 06 47 63 56 80
Suivez-moi sur facebook : https://www.facebook.com/motivatingmindhypnosis/
Source : Anthony de Mello – Extrait du livre « Quand la Conscience s’éveille »